Depuis lundi 23 septembre 2024, la RFI nous informait qu’un coup d’Etat qui aurait été déjoué par le régime de transition dirigé par le capitaine Ibrahim Traoré. En effet selon cette radio: « Au Burkina Faso, la junte assure avoir déjoué une nouvelle tentative de déstabilisation. Selon le ministre de la Sécurité, Mahamadou Sana, le plan prévoyait plusieurs opérations et serait l’œuvre d’anciens militaires et des groupes terroristes. Plusieurs noms, dont ceux du prédécesseur d’Ibrahim Traoré, Paul-Henri Sandaogo Damiba, premier putschiste de 2022, d’anciens ministres des Affaires étrangères et de plusieurs officiers ont été cités par le ministre au cours d’une émission sur la télévision d’État ». Par ailleurs, lors d’une émission diffusée sur la télévision d’État, le ministre de la Sécurité, Mahamadou Sana, a expliqué que « le plan impliquait plusieurs attaques ciblées, dont une action violente sur les populations de Barsalogho en août dernier ». Il poursuivait en précisant qu’ « un groupe armé de 150 terroristes, venu de la région du Centre-Est, projetait de s’attaquer au palais présidentiel à Ouagadougou et à des infrastructures militaires stratégiques, tandis qu’un autre groupe préparait des assauts à la frontière en provenance de la Côte d’Ivoire ». Pour conclure le ministre a également évoqué un certain nombre de personnalités, allant de l’ancien président Paul-Henri Sandaogo Damiba à des anciens ministres et responsables, qui auraient été impliquées dans ce complot, avec des réunions qui auraient eu lieu au Niger et au Ghana. Selon, enfin, Mahamadou Sana, « la coordination de ces opérations serait attribuée au commandant Ahmed Kinda, ancien chef des forces spéciales. En raison de la gravité de la situation, il a confirmé que des opérations spéciales de lutte contre le terrorisme seront poursuivies pour garantir la sécurité du pays ».
Du coup, la version de l’activiste Egounthe Behanzin du LNDA ne sait pas fait attendre. Dans sa logique de combat contre le régime de Faure Gnassingbé, l’activiste confirme la version de la tentative de coup d’Etat au Burkina Faso mais pense que le Togo y serait impliqué.
Quelques heures plus tard, les autorités burkinabés pointent du doigt la Côte d’Ivoire comme le pays où le complot serait préparé.
Eu égard à ces deux versions, le point commun demeure le coup d’Etat déjoué à la seule différence que l’activiste Egountché Behanzin accuse le Togo d’être mêlé à la tentative du coup d’Etat pour la seule raison que l’un des cerveaux reconnus par les autorités burkinabés est en exil au Togo. Il s’agit de l’ex-président Paul-Henri Sandaogo Damiba réfugié militaire et placé en résidence surveillée à Lomé. Selon Egountché Behanzin, si l’ex-président était cité dans ce coup d’Etat déjoué, il ne fait l’ombre d’aucun doute que le régime de Faure Gnassingbé aurait donné son soutien à ce coup. Sa version peut être vraisemblable. Seulement, beaucoup d’observateurs prennent cette information selon laquelle le régime de Faure Gnassingbé serait lié à cette tentative de coup d’Etat au Burkina Faso, avec pincettes. Ces derniers justifient leur doute par le fait de l’accointance politico économique du Togo avec les pays du Sahel et particulièrement du Burkina Faso.
En effet, certains pensent que le Togo n’a pas intérêt à déstabiliser le Burkina Faso, parce que beaucoup d’opérateurs économiques burkinabés utilisent aujourd’hui le Port Autonome de Lomé pour leurs marchandises en transit. D’ailleurs, des réunions intempestives ont lieu entre les fonctionnaires en douanes des trois pays de l’AES et le Togo pour assouplir ou harmoniser les droits de douanes au niveau des quatre pays. C’est pour dire que l’intérêt commun sous-tend la coopération entre ces Etats et le Togo. Raison de plus, des gens doute de l’implication éventuelle du Togo à ce coup déjoué.
Encore faut-il croire à ces raisons pour dédouaner le Togo de cette situation, si l’on se réfère à l’histoire ? C’est la raison pour laquelle d’autres continuent de penser comme le leader du mouvement LDNA Egounthe Behanzin que le Togo est bel et bien impliqué dans ce coup déjoué. D’abord, si l’ex président du Burkina Faso exilé au Togo est l’un des cerveaux du putsch déjoué, il est clair que ses mouvements ne sont pas contrôlés, puisque des informations recueillies de sources crédibles feraient état de ses déplacements au Ghana et en Côte d’Ivoire pour rencontrer ses amis politiques et militaires ou proches du régime défunt de Blaise Compaoré. Vrai ou faux ? Nul ne peut répondre avec exactitude. Mais une chose est sûre, le colonel Paul Henri Damiba est libre de ses mouvements, malgré des reproches faites aux autorités togolaises par le gouvernement burkinabé des actions subversives de l’ex-président burkinabé pour déstabiliser le régime actuel du Burkina-Faso. Le régime de Faure Gnassingbé a-t-il réellement pris des dispositions pour contrôler les déplacements de Damiba, jugé dangereux pour le régime d’Ibrahim Traoré ? Des Burkinabé se souviennent encore de l’assassinat du jeune capitaine Thomas Sankara, dont la préparation serait l’œuvre des présidents défunts Houphouët Boigny de la Côte d’Ivoire et Gnassingbé Eyadema du Togo, selon des sources qui se font toujours crédibles. Des gens craignent que le même scénario risque de se reproduire, car les mêmes causes produisent toujours les mêmes effets en faisant allusion à la vision panafricaine d’Ibrahim Traoré, dont le profil correspond à celui de Thomas Sankara qui optait pour la rupture avec la Françafrique.
Ensuite, beaucoup restent convaincus que la diplomatie togolaise est un couteau à double tranchant. Dans le contexte actuel, Faure Gnassingbé peut-il encore jouer ce double jeu comme le faisait son feu père autrefois ? La question reste posée. Mais toujours est-il que beaucoup restent sceptiques de l’innocence du Togo dans ce plan de déstabilisation de son voisin le Burkina Faso qui, comme le Mali et le Niger ont opté pour la rupture de la politique impérialiste occidentale. Ils fondent leur accusation sur la récente visite du président Faure Gnassingbé au Président Macron, dans le cadre d’une commémoration. Ils pensent que le jeune président togolais aurait reçu des instructions fermes de la France pour contribuer à la déstabilisation du Burkina Faso qui passerait par l’assassinat du jeune capitaine Ibrahim Traoré.
Seulement peu de gens, en se basant sur l’imprévisibilité de Faure Gnassingbé, sur son approche panafricaine à ces pays du Sahel et sur les enjeux économiques, continuent de soutenir la thèse selon laquelle le Togo n’a rien à voir dans cette tentative de coup d’Etat au Burkina Faso. Si tel est le cas, comment expliquer l’implication de l’ex président burkinabé exilé au Togo avec la bénédiction de la France ? Et puis, d’autres évoquent cette tentative de coup d’Etat au Burkina Faso comme l’une des raisons du report, en extrémis, du sommet sur le panafricanisme, qui devrait se tenir à Lomé du 29 septembre au 2 novembre 2024. Reste encore à savoir si cette situation a Burkina Faso est-elle vraiment liée à ce report du sommet !
Tout compte fait, les peuples de la sous-région CEDEAO ont besoin d’une clarification dans cette situation qui remet en cause la stabilité politique des pays, la sécurité et la paix entre les peuples de l’espace CEDEAO, à moins que la dégradation de la situation profite à certains.
Anges Gbedode