Le 30 juillet 2024, Paul MISSIAGBETO, président par intérim du Mouvement patriotique pour le développement et la démocratie (MPDD), parti de feu Agbéyomé Kodjo a rendu son tablier à quelques jours du congrès du parti. Pourquoi cette démission ? Beaucoup de gens se posent cette question.

Paul MISSIAGBETO
Bien d’observateurs de la politique togolaise pensent que cette démission était prévisible si l’on sait que le patron du parti qui était mort en exil serait le seul financier du parti comme c’est le cas d’autres partis politiques au Togo où ces formations politiques sont devenus des entreprises pour leurs présidents fondateurs qui sont pratiquement les seuls à mettre la main à la poche lors des activités. Parfois, ce sont les présidents fondateurs de ces partis qui payent certains cadres de ces partis de l’opposition. La culture politique qui exigent que les militants cotisent au sein des partis politiques n’est pas dans les habitudes de ces cadres qui attendent plutôt des motivations ou retombées financières de leurs chefs de partis politiques. Toute chose qui est contraire dans les pays traditionnellement démocratiques où les activités des partis politiques sont financés pour la plus grande partie par les cotisations des membres et des sociétés privés ou opérateurs économiques qui financent même les campagnes des candidats des partis de l’opposition qui veulent accéder au pouvoir contre des dividendes dont leurs sociétés tireront à partir de leur programme de politique économique des qu’ils gagnent des élections présidentielles. Dans certains Etats africains où l’alternance est une réalité, on peut observer des politiciens mener leurs activités économiques sans craindre des représailles fiscales, ce qui est loin d’être le cas au Togo.
Or, au Togo, le fonctionnement des partis de l’opposition pose problèmes pour la simple raison que ceux-ci ne disposent pas de moyens financiers pour leurs activités contrairement au parti au pouvoir qui dispose des moyens de l’Etat et des ressources du pays pour mener ses activités politiques en violation des textes. Bref, les partis politiques de l’opposition se rabattent sur les fonds propres du président fondateur qui n’a d’autre choix que de débourser de l’argent de ses propres poches pour faire survivre son entreprise. C’est pourquoi d’ailleurs que certaines décisions au sein de ces partis sont incontestées ou incontestables parce qu’elles viennent directement du président qui peut imposer tout aux membres du parti. Une situation qui crée parfois des transhumances politiques où le pouvoir a cette largesse de débaucher facilement des cadres de ces partis de l’opposition, lorsque ces derniers découvrent que leurs patrons aussi frottent en catimini avec le parti au pouvoir pour jouir des délices de ce pouvoir qu’ils comptent combattre.
Dans le cas de M. Paul MISSIAGBETO, qui a pris la tête du parti au moment où il y a eu scission dans la coalition Dynamique Monseigneur Kpodzro (DMK) au sein de laquelle se trouvait son parti MPDD, on peut se poser la question de savoir si son départ ne serait pas lié à la mort de feu Agbéyomé Kodjo qui était le grand financier du parti. Autrement dit, si la raison financière ne sous-tend pas ce départ. Et si la raison évoquée par le concerné paraît plausible, l’autre raison mercantile ne justifie pas ce départ, sinon de tout temps il est démontré que les transfuges de l’opposition sont partis pour rejoindre le parti au pouvoir, parce qu’ils voulaient se faire une santé financière. C’est là où d’autres posent la question sur l’éthique et la morale dans la politique togolaise. Existe-t-il vraiment des politiciens de conviction au sein de la classe politique?
Depuis le déclenchement du vent de la démocratie dont les principes peinent à s’installer réellement au Togo, il y a eu des transfuges de part et d’autres, mais le plus éloquent fut des transfuges de l’opposition qui justifient leur départ par l’assouplissement de leur position à travers une opposition dite modérée par les uns, une opposition constructive par certains, parfois une opposition tempérée par d’autres afin de changer le système de l’intérieur. Donc, pour ces réformistes, il faut côtoyer les tenants du pouvoir pour changer le système. La question qu’on doit se poser: ont-ils réussi cette mission ou ont-ils atteint leurs objectifs ? Non: car le système reste en place, la mal gouvernance est plutôt renforcée que jamais. Finalement, ils ont rejoint le camp adverse pour se réaliser, car la politique, comme le disent beaucoup de gens, est une ouverture ou une opportunité pour s’enrichir. Voilà la conception qu’ont des politiciens togolais. Paul Missiagbéto aussi va-t-il s’inscrire dans cette catégorie de politiciens ? La question demeure. En tout cas, seul l’avenir nous le démontrera s’il est un opportuniste politique ou un transfuge qui quitte son parti et va dans l’autre camp ou carrément un converti.
Anges ADJANOR