A la veille des élections qui pointent à l’horizon, les acteurs politiques expriment leur désir de s’y présenter. A part les membres du parti au pouvoir RPT-UNIR qui n’ont rien à perdre parce qu’ils sont en position de force, les leaders de l’opposition pour la plupart confirment leur participation malgré les conditions peu orthodoxes dans lesquelles la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) tente d’organiser ces consultations électorales.
En effet, l’Alliance nationale pour le changement (l’ANC), un parti dont le leader se réclame le plus populaire, affirme qu’il ne boycottera plus d’élections au Togo. Même son de cloche pour la Dynamique pour la Majorité du peuple(DMP), un regroupement né de la scission de la Dynamique Monseigneur Kpodzro (DMK), confirme sa participation aux prochaines élections. Pareil pour l’Alliance Ensemble dont la figure de proue est le président du Mouvement citoyen pour la démocratie et le développement (MCD) et le Comité d’Action pour le Renouveau (CAR), la branche de Yao Daté, de réaffirmer leur volonté d’accompagner le gouvernement dans l’organisation des élections. Idem pour le Pacte Socialiste pour le Renouveau (PSR) n’entend pas opter pour le boycott.

En somme, tous les partis politiques de l’opposition sont prêts pour compétir même s’ils dénoncent des irrégularités dans le processus. Tous à l’unanimité porte des réserves sur le processus d’enrôlement sur les listes électorales, bref sur le fichier électoral, que les experts de l’Organisation Internationale de la Francophonie jugent après audit, fiable et acceptable pour les élections futures. Or, nul ne sait si réellement ce fichier est bon puisque l’opposition n’a pas été du tout prévenu de l’arrivée et du travail de ces experts auxquels la CENI a fait appel sans informer les partis politiques de l’opposition pour son travail.
Et si le travail de ces experts peut être accepté, qu’est-ce qui a empêché la CENI d’associer les autres acteurs politiques à ce processus? De toutes les façons, le déficit de confiance qui mine l’atmosphère politique s’est alourdi ces derniers temps. Le peuple reste indifférent à tout ce remue-ménage qui secoue encore ces acteurs politiques qui ne lui offrent que le même spectacle: un éternel recommencement, dirait un avisé de la politique togolaise.

Malgré les mauvaises conditions dans lesquelles se préparent les prochaines élections, le peuple ne comprend pas la position qui frise le flou kafkaïen de l’opposition togolaise qui semble rechanter le même refrain: « Nous n’exprimons pas nos doléances comme des préalables à la participation aux prochaines élections, histoire de ne pas démotiver notre électorat », a bien précisé Me Tchassona qui ajoute qu’ils ne boycotteront plus des élections dans ce pays. A Mme Brigitte Adjamagbo de renchérir en disant qu’ils ne tomberont plus dans ce piège du pouvoir qui cherche à nous contraindre d’opter pour la politique de la chaise vide », dixit la Coordinatrice de la coalition DMP.
Les autres partis politiques de l’opposition qui ne sont pas du reste évoquent les mêmes raisons qui justifient leur participation certaine aux prochaines élections.
Toutefois, la question demeure et risque d’être reposée: pourquoi continueront-ils à accompagner ce régime dans les mascarades d’élections? Lorsqu’on leur pose la question de savoir s’ils participeront à ces élections sans les réformes électorales, institutionnelles et constitutionnelles, tous les leaders des partis de l’opposition réaffirment qu’ils y participeront. De tout temps, ces parts politiques, adversaires du parti au pouvoir, ont participé aux échéances électorales, mais leur participation n’a rien changé du système de fraudes électorales en place. L’opposition n’a jamais eu la majorité absolue. Finalement, le peuple constate avec amertume et désolation que l’opposition va aux élections pour satisfaire ses propres besoins politiques à travers quelques sièges à l’hémicycle afin de se faire une santé financière, telle est l’opinion que se font les Togolais dont la plupart sont lassés par la routine politique. Nombreux sont ceux qui n’entendent plus s’associer au jeu malsain des hommes politiques du pays qui font de la politique, un fonds de commerce. Rien ne justifie, la position participationniste des acteurs de l’opposition, si ces derniers reconnaissent que les dés seraient déjà pipés.
Au lieu de remobiliser le peuple à travers des mouvements d’indignation, afin de faire la pression sur le régime qui n’a pas la volonté de faire des réformes réclamés depuis des décennies et consignées dans des accords, il est malheureux et criminels de constater que ces derniers qui sont censés porter les aspirations de ce peuple meurtri, s’accommodent des tristes réalités du pays en étant dans une complicité avec le pouvoir en place pour maintenir ce système rétrograde qui asservit ce peuple pendant plus de cinquante ans.
En définitive, au regard de cette politique de statu quo dont se délectent et les membres du parti au pouvoir et les membres de l’opposition, le peuple togolais est un peuple orphelin, car il est laissé pour compte. Tous les observateurs et acteurs politiques s’accordent sur une chose: les élections organisées par des institutions caporalisées ou inféodées par le gouvernement ne vont jamais régler la crise politique au Togo. D’ailleurs, la CENI actuelle qui est l’organe qui s’implique davantage dans la préparation et l’organisation de ces élections n’est plus légale et légitime pour conduire ce processus en cours, pour la simple raison que son mandat est arrivé à son terme. C’est dire que les membres de cette institution ne sont plus autorisés à organiser des élections. Ces membres doivent rendre le tablier. Il faut nommer d’autres membres.
Pareil pour la Cour Constitutionnelle dont deux membres sont décédés y compris le président. Voilà l’état dans lequel se trouvent les deux principales institutions en charge de ces élections.

Comment peut-on accepter participer aux prochaines élections si tant est que les institutions sont boiteuses? Et dire que les partis de l’opposition acceptent participer aux élections sous la houlette de ces institutions à la solde du parti au pouvoir, c’est prouver au peuple togolais qu’ils y iront pour légaliser ce pouvoir illégitime qui veut se servir d’eux pour maintenir ce système en place. Que ceux qui vont prendre le risque d’y participer sans les réformes, ne viennent pas pleurnicher, comme c’est souvent le cas après ces échéances, que le parti au pouvoir les a volés! Un refrain qui devient redondant que cette classe politique a toujours habitué ce peuple d’entendre. A quand au juste cette prise de conscience politique qui veut que ces acteurs politiques de l’opposition changent de braquets?
Anges Dieudonné Adjanor-Kouanou, journaliste-écrivain