« Depuis quelques jours, la situation sociopolitique togolaise est marquée par une série de réactions, suite à la publication du rapport du Fonds de Riposte et de Solidarité Covid-19, Gestion 2020 par la Cour des comptes. Parfois spontanées ou incitées, ces réactions,qui ne sont aucunement une nouveauté dans le chapelet des scandales financiers au Togo, ne poursuivent d’autres buts que de permettre à certains partis politiques et organisations de la société civile de se donner bonne conscience et tirer les marrons du feu quant à leur visibilité recherchée. Il ne saurait en être autrement, car dans les faits, les communiqués radios, les condamnations de principe, les conférences de presse, dénonciations et autres, n’ont pu à ce jour, offrir les moyens de sauver le peuple togolais contre ces prévarications immondes qui se perpétuent dans l’air d’un slogan de campagne: « Allons-y seulement !». C’est ce que regrette KARIYIARE Kampatibe, président de l’Association des Usagers du service public (AUSEP) dans une déclaration rendue publique ce 19 février 2023.

Cette structure s’insurge donc contre les dénonciations « stériles des organisations de la société civile et des partis politiques et appelle le peuple à prendre ses responsabilités »
« La libération des dominés ne passe pas par la culpabilisation des dominants, mais par la responsabilisation des dominés. Désigner le pouvoir comme responsable de la situation du peuple, c’est se décharger de la responsabilité de la situation qu’on subit, ce n’est ni rendre service au peuple ni lui rendre hommage. Il ne s’agit pas de dénoncer la servitude, mais il s’agit d’en sortir. Reprocher à l’oppresseur d’être un oppresseur ne fait pas avancer la cause des opprimés. Le pouvoir ne peut opprimer que des opprimés consentants. Il dépend entièrement de nous, de nous laisser opprimer » soutient l’AUSEP en citant Etienne de la BOETIE.
Pour cette association, le peuple togolais a ras-le-bol des dénonciations. Et pour elle, « attendre sa délivrance de la société civile telle qu’elle existe en l’état, c’est n’avoir pas tiré les leçons de ses mésaventures avec les partis politiques soi-disant de l’opposition ».
L’AUSEP estime que « cette société civile de la communication n’a plus rien à offrir au peuple togolais. Si tel n’est pas le cas, pourquoi ne forme t- elle pas un seul bloc pour faire avancer les choses? Cette société civile là, comme les partis politiques, reste déchirée par les conflits de leadership qui cachent mal des intérêts personnels ».
Guetter chaque occasion pour se faire une visibilité personnelle, voilà la seconde nature de bon nombre de partis politiques et d’organisations de la société civile. A chaque évènement, c’est la course aux premières réactions. Et dans un air d’autosatisfaction stérile, on se dit : « Je suis le premier à réagir, puis après ? ». On se demande si les évènements sociaux décriés ne leur rendent pas en dernier ressort un énorme service? Dans ces conditions, le peuple malmené et balloté aux vents, peine à se libérer de son jugement.
AUSEP appelle le peuple à se libérer
« Se libérer de son jugement, c’est ne plus projeter ses attentes sur les partis politiques et OSC qui, en filigrane, ne poursuivent que des intérêts inavoués. Se libérer de son jugement, c’est se débarrasser au plus vite, du manteau de la trahison et du désespoir. Le peuple togolais doit se dire dès à présent qu’il n’a plus d’autres portes paroles que lui-même. Dire non au captage des ressources publiques, à la mal gouvernance dans ses formes hideuses, passe par l’amorce d’un nouvel éveil citoyen. Si les vices privés font la vertu publique, d’après MANDEVILLE in « Fables des abeilles », le cas togolais suscite curiosité, car les vices privés ne font que le bonheur d’une minorité. Quelle horreur ! Au demeurant, il reste irréfutable qu’aussi longtemps qu’on quémandera la compassion du pouvoir, aucun bonheur ne s’offrira à nous. Le Togo est hélas le seul pays où les citoyens attendent la compassion des gouvernants, où les citoyens se lamentent et pleurnichent lorsqu’ils sont volés et malmenés. Y- a-t-il encore une dignité à défendre ? Nos complaintes, supplications et cris de détresse n’apporteront rien à nos malheurs, si ce n’est conforter le pouvoir, car « Il faut être faible pour croire que le fort a pitié du faible », selon Etienne de la BOETIE.
Pour l’AUSEP, « Dénoncer, c’est bien beau, mais qu’est- ce que cela apporte dans les faits ? A part, l’autosatisfaction de se dire qu’on fait partie des opprimés, à part le confort de la bonne conscience couchée en position fêtale, quelle amélioration obtient-on dans la pratique ? Aucune. Aussi longtemps qu’on attendra des oppresseurs qu’ils cessent d’être des oppresseurs, on restera des opprimés. L’oppresseur n’est pas oppresseur par accident, il est oppresseur parce qu’il veut l’être. Et donc, toutes les tentatives pour faire prendre conscience à l’oppresseur que ce qu’il fait est injuste, n’auront aucune conséquence, sinon lui confirmer que les opprimés ne cherchent pas à se libérer. La seule conséquence de la dénonciation du pouvoir de l’oppresseur, c’est la confirmation de son pouvoir. Vouloir culpabiliser l’oppresseur d’être un oppresseur, c’est lui envoyer un message très clair, c’est lui dire qu’il a gagné. Si nous sommes esclaves, c’est parce que nous voulons être esclaves. Les responsables de la domination, ce ne sont pas les dominants, mais ce sont les dominés. La condamnation n’aura aucun effet sur la situation objective du peuple. Trouver dans le pouvoir, un objet de complainte, c’est s’assurer les lauriers de sa déresponsabilisation ».
La plus grande naïveté, c’est croire qu’on sera entendu par un gouvernement qui n’est pas comptable devant le peuple.
C’est pourquoi AUSEP appelle les Togolais à « sortir des sentiers battus pour se sauver » des oppresseurs et des condamnations stériles.